vendredi 22 février 2008

Rachid Daïf

Chaque jour, le citoyen libanais vit sans électricité pendant trois heures. Ce peut-être au réveil, le chauffage est éteint et la bouilloire silencieuse. Ou à midi, on hésite à prendre l’ascenseur même pour monter au 10e étage. Ou encore le soir et il faut alors prévoir un arsenal de bougies. J'ai appris à parer à tout moment au noir et/ou au froid. Sans trop me forcer, il faut l'avouer tant les bistrots sont pour moi un second domicile que ce soit à Beyrouth ou à Paris, je travaille souvent dans les cafés qui, grâce à leur groupe électrogène, sont toujours éclairés et bien chauffés. Mais hier, Leïla a trouvé la parade : « En fait, ils coupent un jour de 18h à 15h, le lendemain de 15h à 12h et le surlendemain de 12h à 9h ». Al Hamdoulillah, je vais enfin pouvoir reprendre l’ascenseur mais je continuerai à bosser dans les cafés propices aux rencontres ! Ce matin, sirotant mon petit noir chez Costa, j'ai ainsi fait la connaissance du romancier Rachid Daïf, auteur d'un magnifique roman sur l'apreté de la société montagnarde dans les années soixante (Cher monsieur Kawabata, Actes Sud). L'homme correspond à l'idée que je me faisait de lui, visage fin, caustique, l'oeil vif. On devise sur la confusion que font certains journalistes entre le narrateur et l'auteur. "L'un d'eux a écrit que j'entretenais une relation avec ma concierge en m'associant au héros de l'un de mes romans qui parlait à la première personne" . On rit, il prend congé et je me souviens d'un passage de son livre à la fois cruel et juste : "Chacun déciderait-il de dire ce qu’il a sur le cœur, il y aurait sur terre une odeur insupportable."

Aucun commentaire: